«Ghostly plants of damaged words»: Étude artistique autour de la phytoremédiation et du sol de la ville de Jesenice en Slovénie, ou comment apercevoir le sol comme un modèle de création écologique

«Ghostly plants of damaged words»: Phytoremediation artistic project study about Jesenice Slovenian city soil or how to see the soil as a model of artistic ecology

Alizée Armet
Chercheuse indépendante, Francia

«Ghostly plants of damaged words»: Étude artistique autour de la phytoremédiation et du sol de la ville de Jesenice en Slovénie, ou comment apercevoir le sol comme un modèle de création écologique

AusArt, vol. 12, núm. 2, pp. 175-187, 2024

Universidad del País Vasco/Euskal Herriko Unibertsitatea

Recepción: 24 Marzo 2024

Aprobación: 05 Mayo 2024

Résumé: C’est par le biais de l’œuvre «Ghostly plants of damaged world», une installation biomédia, qu’est proposée une vision particulière sur les croisements entre technologie et écologie. Le biomedia se réfère à tout système médiatique présentant des attitudes similaires à celles du non-humain. Par des invocations de savoir et de techniques scientifiques, cette recherche-création soulève les limites de notre entendement sur ce qu’est la typologie d’un sol. Par la présentation d’une mutation d’une plante albinos et du mutualisme de mycorhizes, l’œuvre nous renvoie à cette idée que l’écologie n’est pas seulement une attention à nos usages, mais à une attention relationnelle. De cette démarche, nous nous focaliserons sur la méthodologie de recherche et les étapes de création et les savoirs apportés.

Mots clés: BIOMEDIA, ALBINOS, PHYTOREMEDIATION, SYSTHÈME.

Abstract: «Ghostly plants of damaged world» -a biomedia installation- offers a particular vision of the crossroads between technology and ecology. Biomedia refers to any media system with attitudes similar to those of the non-human.Through invocations of scientific knowledge and techniques, this research-creation raises the limits of our understanding of what constitutes soil typology. By presenting the mutation of an albino plant and the mutualism of mycorrhizae, the work reminds us that ecology is not just an attention to our uses, but a relational attention. From this approach, we will focus on the research methodology and creative stages involved in the work, and the knowledge contributed.

Keywords: BIOMEDIA, ALBINOS, PHYTOREMEDIATION, SYSTEM.

État d’art

Tous sont avec la terre et de la terre, et ce sont bel et bien les puissances biotiques et abiotiques et cette terre qui auront le rôle principal (Haraway 2015, 78).

Constituée de 20 000 km2 de superficie, la Slovénie a un fort passé d’activités minières depuis le XIXe siècle. Aujourd’hui, cinq sites d’élimination de déchets subsistent encore: Mezica (pour le plomb et le zinc); Idrija (pour le mercure); Zirovski Vrh (pour l’uranium); Jesenice (pour la ferraille); Kidriveco (pour la transformation de l'aluminium). Nous devons rapporter également la présence de dix autres sites contenant des déchets provenants d’industries qui représentent un réel danger. Branko Druzina et Andrej Perc, chercheurs au sein de l’université de Ljubljana, avertissent qu’en Slovénie, il n'existe qu'un seul site réglementé d'élimination active des déchets nocifs et dangereux (Druzina & Perc 2010). Il s’agit de Metava à Maribor. Cependant, il existe également un nombre de décharges en raison d’une élimination inadéquate des déchets de l’industrie allant de 1950 à 1990. Le site de Globovnik, qui se situe près de Ilirska Bistrica; le dépôt d’acide de Pesnica à Studeci; Bohova près de Maribor; le site de boue rouge et de cendres résultant de la transformation de l’aluminium à Kidriveco, le site de sable de fonderie à Crnomelj; le site contaminé avec du PCB près de Semic1. Des mesures de phytoremédiation ont été menées, mais n’ont pas été abouties par manque de ressources2.

Courant 2022, nous avons découvert le travail de recherche du biologiste Zane Moore et de l’herboriste Tom Stapleton, de l’université de Californie. Leur recherche porte sur l’espèce Sequoias sempervirens albinos au Muir Woods National Monument et au Humboldt Redwoods State Park en Californie. Les conversations menées ont permis de découvrir une corrélation possible entre un sol acide pollué en nickel et une compétence de phytoremédiation propre aux plantes chimériques (Stapleton 2017). Notre hypothèse est dès lors que certaines plantes albinos peuvent «nettoyer le sol» et qu’une œuvre en recherche-création aurait l’avantage de questionner d’autres rapports écologiques aux activités industrielles et aux savoirs scientifiques et biologiques.

C’est en présence de ces informations que «Ghostly plants of damaged world», œuvre biomédia, a vu le jour3. Soutenu par l’institut Kersnikova4 pour une résidence de recherche d’octobre à novembre 2022, l’œuvre a été exposée dans diverses expositions en Europe5. Cette œuvre expose comment une œuvre d’art artistique peut entrelacer des questionnements écologiques par la phytoremédiation et invoquer des techniques et des connaissances du champ Art et Science (Hauser 2016; Thacker 2004). Tenant comme hypothèse la faculté des plantes albinos et comme matériau des échantillons du site de Jesenice, l’œuvre raconte une spéculation sur des plantes albinos hyper-accumulatrices et sensibilise à la résilience des activités humaines. Nous dévoilerons les méthodes de travail pour la réalisation de cette œuvre pour expliciter comment la pratique artistique donne un autre regard sur la phytoremédiation en tant que sujet social, politique et technologique et de conclure.

D’une culture, aux prélèvements pour une conception d’une œuvre en système

«Ghostly plants of damaged world» présente un certain nombre d’éléments -sérums, plantes albinos, mycorhizes, capteurs- de l’état d’une œuvre d’art en système et de techniques singulières. Selon Harries (1981), l’art systémique est une tentative de développer un cadre de référence plus ouvert dans lequel il est pris comme un modèle à imiter. C’est un style d’art selon lequel l’observation des formes représentées et la relation entre elles participent à comprendre la construction d’une organisation. En effet, la conception d’équipements propres à l’œuvre a nécessité la mise en place d’un atelier-laboratoire à l’institut Kersnikova. Les techniques issues de la biotechnologie telles que la «culture in-vitro»6, l’élevage de mycéliums et de plantes albinos ont demandé à croiser des techniques scientifiques autant qu’artistiques (Taji, Dodd & Richard 1990 ; R-Open Education video7). Le geste artistique souligne la présence de structures, de processus plutôt que la présentation d’un art médiatique traditionnel. Cette opportunité croise des intersections entre l’art en système et une sensibilité écologique qui permet de comprendre les phénomènes complexes et de dessiner des interventions.

«Ghostly plants of damaged world»
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«Ghostly plants of damaged world»

2022. Recherches au Vivarium. Institut Kersnikova. De gauche à droite: étude du sol; culture de plante albinos; et élevage

© Alizée Armet

Pour la création d’une installation présentant des plantes albinos, le laboratoire matérialise des techniques scientifiques et médiatise les problématiques du développement durable, notamment la phytoremédiation. L’inspiration de ce fonctionnement «organique» a donné matière à imaginer et à produire des contenants à fleurs qui aient une portée esthétique. Identique à la création d’un scénario, chaque pot expose une action potentielle dans l’écosystème. Le cadre du laboratoire permet ici d’imaginer des situations potentielles et de proposer des actions en adéquation. Un contenant contient la plante et un sol pollué tandis que l’autre dispose d’un substrat nutritif et inoculé par une mycorhize -association symbiotique entre un champignon et un système racinaire. Le dispositif permet alors de percevoir si la plante peut matérialiser des idées véhiculée dans la phytoremédiation. «Bio art: Sculpting plants with fungi in the laboratory» (2018-en cours) de Juniper Harrower est une démonstration d’artiste d’études des plantes et d’imaginaire du futur de l’humanité8. À partir de manipulations scientifiques, Harrower développe une esthétique environnementale autour du mutualisme des mycorhizes et des arbres appelés «Joshua». Grâce à la phytoremédiation, l’interaction mutuelle entre deux espèces organiques dévoile également la capacité de télescopage artistique. Par «Ghostly plants of damaged world», la volonté artistique se positionne dans la présentation de systèmes complexes et de processus. L’exemple en octobre 2022 sur le site de Jesenice d’extraction de terre en haute teneur en métaux lourds déplace le geste de l’artiste. Il ne s’agit pas que de représenter un biomatériau. Il faut créer en tenant compte de l’origine et de l’environnement de la matière.

«Ghostly plants of damaged world»
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«Ghostly plants of damaged world»

2022. Dessin de fonctionnement des pots

© Alizée Armet

L’alliance de l’art en système et de l’écologie est un croisement d’intérêts sur l’usage de la technologie. La création de pièces interactives et dynamiques répond à des actions d’observations et de conditions environnementales. Différents schémas et réflexions ont abouti à une forme finale dans laquelle la sculpture est une spéculation et une médiation des systèmes. Présentant une table médicale, l’installation comprend des instruments de mesure, des plantes et des sérums d’infusion de sol pollué, des capteurs (pH, température, humidité), d’un microscope et d’un système automatique d’irrigation par télécommunication (Hamster.io webpage9; How to electronics webpage 2022-202310...). «Ghostly plants of damaged world» est une œuvre qui dépasse le simple objet d’étude pour créer une forme d’art extrospective dans laquelle le visiteur peut observer et partager des expériences. La conséquence est une plus grande appréciation et une meilleure connexion à l’environnement, qui induit à une meilleure connexion de la façon dont la technologie s’intègre dans l’environnement au sens large. L’emploi de la plateforme ThinkSpeak est une réponse à désensibiliser la transformation de l’écosystème en données numériques et avant tout à prendre conscience d’enjeux comme la commercialisation du développement durable. L’installation diffuse sans cesse des données issues des capteurs pour avertir le public et comme l’avertit Steyerl (2009) que la «technologie n’est pas neutre»11. Son usage est changé en fonction de son utilisation et de la volonté de son utilisateur.

«Ghostly plants of damaged world»
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«Ghostly plants of damaged world»

2023. Poster

© Alizée Armet

Aujourd’hui, un appareil est en cours de production. Aidé de Jakob Grucman, technicien de l’institut Kersnikova, un capteur de métaux lourds dans une solution aqueuse doit ajouter un regard complémentaire. C’est en lisant l’article de Thipnet, Sawangwong, Issro & Chodjarusawad (2016) que nous nous sommes aperçus de l’importance de la présence de cette technologie. Ce dispositif évalue la dépollution des plantes albinos. Tsing raconte qu’«en remodelant le paysage, l'humain oublie ce qu'il y avait avant» (2016, 6)12. Dans la narration de «Ghostly plants of damaged world», les plantes deviennent des porte-paroles de systèmes contaminés et mutés et non plus des sujets de représentation. La phytoremédiation devient un modèle d’acceptation d’activités passées humaines.

Une œuvre vivante qui demande à être observée

Étant exposée à différents moments et lieux, l’œuvre a bénéficié de plusieurs améliorations et/ou changements. Les premières versions ont présenté des petites pousses et une version simple avec juste des contenants à WRO Media Art Biennale (image 4-1) et à Ars Electronica (image 4-2). Une autre version à un stade avancé présente des plantes et un système de poche de rétention à la galerie Kapelica (image 4-3). La dernière version sera présentée lors de l’événement Ecsite à Ljubljana du 3 au 5 juin 2024 avec le capteur de métaux lourds et des protocoles de contrôle. Les différentes versions de «Ghostly plants of damaged world» présentent autant de réponses potentielles aux manières d’exposer une œuvre d’art biotechnologique.

Une installation qui invoque des médiums issus de la biotechnologie sollicite d’autres paramètres de monstration qu’une œuvre d’art visuel. La complexité de diffuser une œuvre du bioart est l’esthétisation de la biotechnologie. Il existe une fascination au détriment d’une réflexion critique qui implique une modification du fonctionnement du vivant pour répondre aux intuitions artistiques. L’essor du romantisme, il y a plusieurs siècles a favorisé de la part des artistes un détachement de leur engagement scientifique et technique. Yetisen, Davis, Coskun, Church et Yun pensent que «[la] critique et l'application de la science se poursuivront sans aucun doute, mais la capacité du bioart à aider la science à se comprendre elle-même constitue peut-être une contribution plus importante et moins reconnue» (2015)13. Alors pourquoi ce mouvement mérite une autre approche? Bien que le débat autour de l’esthétique soit une des conversations les plus anciennes, nous faisons face à un questionnement du contenu de la représentation elle-même. Pour qu’un processus de manipulation biotechnologique d’organismes vivants soit possible, il faut qu’il y ait une représentation in vivo. Eduardo Kac le distingue en mentionnant que:

[...] le bioart doit être clairement distingué des formes d’art traditionnelles qui utilisent exclusivement des médias numériques pour aborder des thèmes biologiques, comme dans une peinture ou une sculpture représentant un chromosome ou une photographie numérique suggérant des enfants clonés. Le bioart est in vivo14.

Et cette compréhension engendre une réflexion sur la monstration de l’installation. Doit-on montrer un processus de manipulation biotechnologique d’organismes vivant en une «unité» comme une sculpture ou comme un système? Mitchell propose une distinction entre «art prophylactique» et «art vital». Le premier se réfère aux arts qui utilisent des moyens traditionnels (peinture, sculpture, etc.) et le second à ceux qui sont biologiquement médiatisés par une intervention biotechnologique. En effet, le dilemme réside dans la génération de problèmes de type éthique et ontologique:

L’intérêt d’employer une biotechnologie authentique est d’immerger les galeristes dans des pratiques biotechnologiques alternatives. Ainsi, plutôt que de chercher à protéger les galeristes des effets de la biotechnologie, la tactique vitaliste cherche à utiliser les spectateurs eux-mêmes comme moyen - ou média - pour générer de nouvelles possibilités biotechnologiques […] la tactique prophylactique et la tactique vitaliste du bioart semblent souvent s’inscrire dans une différence entre 'représentation' et 'présentation' (Mitchell 2010, 28)15.

En bref, «Ghostly plants of damaged world» présente la mutation des plantes non à partir des moyens de représentation, mais plutôt à partir des relations qu’il créait entre le public et la biotechnologie. L’«objet» ne se suffit pas à lui-même. Il faut inclure ses affects, le public et le contexte. Les évolutions de l’œuvre sont tout autant considérées comme des écosystèmes d’expositions que des «écosystèmes sensibles» du public. Suivant la floraison des les plantes, de l’espace de salle d’exposition ou des expériences sensorielles précédentes, l’œuvre évolue que necessaire.

Ces prises de conscience impliquent une part prépondérante à ce qui est une hantise dans l’art contemporain: la maintenance. Pour autant, c’est ce qui nous rapproche le plus d’une matérialisation de l’écologie pour la pratique artistique. Lors de l’événement ISEA2023 à Paris, Samuel Bianchini, artiste-chercheur français, stipule qu’«elle matérialise les relations issues de la technicité et de la pièce elle-même»16. La maintenance est perçue comme une performance pour «Ghostly plants of damaged world». Il est commun que des échanges s’opèrent avec les visiteurs durant des réparations ou pendant un nettoyage de poches à perfusion. L’œuvre devient un activateur écologique de médiation. Elle n’est pas inerte comme une sculpture d’arts visuels. Elle n’est pas non plus interactive comme les installations médiatiques, mais elle présente le «in-vivo», comme elle présente le système qui l’entoure, où «il n’y a plus de sujet et d’objet, mais des médiateur.rices et des traducteur.rices» (Lucquet-Gad 2024).

«Ghostly plants of damaged world»
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«Ghostly plants of damaged world»

2023-24. Évolution de l’œuvre. De gauche à droite: (1) WRO Media Art Biennale; (2) Ars Electronica; (3) Kapelica Gallery

© Alizée Armet, Droits publics; Marn/Gallerie Kapelica Archives dans le cadre du financement EMAP EMARE/Adagp

Une œuvre d’art pour penser l’écologie entre les nouvelles-technologies et notre rapport au sol

Pour répondre à la problématique principale de l’œuvre, nous nous sommes heurtés à des questions indissociables. Ce qui touche à l’écologie touche autant la politique, la technicité, la philosophie qu’à des intuitions artistiques (Armet 2023). Simondon nous demande de réfléchir à la technicité comme une «soudure entre l’homme et le monde et paradigme du rapport entre vivants et milieu» (Simondon 2005, 85). Le terreau ou le sol est notre matériau pour approcher la question de la technicité -effets de l’activité humaine dans l’écosystème- et de le rapporter à une perception moins anthropocentrique. La terre est une matière prépondérante en art contemporain. Des œuvres comme «Les souffles» de Giuseppe Penonne (1978) ou encore «Sublimations: Éclairage néon, terre, aquarium, eau, couple d’axolotls» de Mathieu Mercier (2012) sont autant d’exemples de forme «auratique» que de matériaux indiciels.

En considérant le sol comme un élément complexe et biologique, «Ghostly plants of damaged world» se démarque de ces œuvres. La monstration de pots transparents et de la mutation du sol par les métaux lourds donnent l’expérience du in vivo. Fort est d’assimiler ce geste à la pensée de Springer et de Turpin (2015): «Le sol est le filtre par lequel doit passer toute production matérielle»17.

Le sol est à la fois solide, liquide, transformé, dilué, terreau, infusion ou prélèvement. Il est transmuable. Nahon (2008, 5) suggère que c’est une «une mutation de poussière de minéraux, d’argiles» et d’éléments composites issus de transformations métallurgiques. La terre mérite une autre forme plastique qu’une forme esthétisante. Par les manipulations scientifiques et la conception de la pièce, le sol offre mille visages pour celui qui la travaille, mais surtout pour ceux qui «cohabitent». Inclure des organismes (plantes et des mycorhizes) dans un sol pollué et de prendre des mesures scientifiques ( pH, humidité, présence de métaux) permettent de matérialiser le sol en tant que médium de vie. Les instruments de mesure utilisés ont servi à comprendre qu’un sol acide engendre un écosystème différent d’un sol basique ou neutre. C’est un matériau de création vital. L’attention artistique est importante ici. «Ghostly plants of damaged world» participe à ce que le geste artistique soit une attention accentuée sur un matériau qu’on a tendance à isoler et donc à oublier les alliances. Pour rappeler Tsing, isoler une forme peut annuler de potentiels scénarios. Si le terreau utilisé pour “Ghostly plants of damaged world» ne provenait pas de l’endroit contaminé de Jesenice, mais d’une autre ville slovène, est-ce que les plantes albinos auraient vu le jour ou se seraient-elles développées en plantes disposant de chlorophylle?

Conclusions

Le travail artistique «Ghostly plants of damaged world» questionne le rapport de l’humain à la «Terre-sol». Un désossement de l’esprit humain d’une possession et d’une prédation des organismes oriente une perception cosmopolitique humanitaire et plus sensible. Dans cette œuvre est analysé ce qu’est le paysage hanté par des modes de vies passés et le matériau du «sol pollué». Ces paysages anthropiques détruits et/ou abimés sont également hantés par des future en échange de mondes rêvés de progrès. Oubliant ce qui existait avant, ces paysages sont la nouvelle réalité. Les plantes albinos illustrent notre oubli et l’imprégnation totale humaine dans le sol.

«Ghostly plants of damaged world» propose cependant qu’une ambivalence du soin est possible et est nécessaire. Certaines plantes albinos disposent d’une capacité de «phytoremédiation», pour autant, elles sollicitent constamment une aide nutritive. En disposant d’une source artificielle de nourriture, la mutation n’est pas comme une maladie, mais une forme collaborative et à une réflexion technique de l’écologie.

Ces critères changent nos connaissances quant à la présentation du vivant. Une installation «in vivo» doit être plurielle et en perpétuelle évolution impliquant les changement de son contexte d’évolution et les expériences cognitives des visiteurs.

Références bibliographiques

Armet, Alizée. 2023 «Alizée Armet and the 'Ghostly plants of damaged words'». Interview by Ewen Chardronnet. Makery.com, 7 nov. https://www.makery.info/en/2023/11/07/alizee-armet-et-les-plantes-fantomes-des-mondes-abimes/

Druzina, Branko & Andrej Perc. 2010. «Sites in the Republic of Slovenia polluted by heavy metals: Strategy and actions planned». Proceedings of the Annual International Conference on Soils, Sediments, Water and Energy: 12. https://scholarworks.umass.edu/soilsproceedings/vol12/iss1/12

Haraway, Donna Jeanne. 2015. «Sympoièse, sf, embrouilles multispécifiques». Dans Gestes spéculatifs, édité par Didier Debaise & Isabelle Stengers; traduit par Isabelle Stengers, Benedikte Zitouni & Vinciane Despret. Paris: Les Presses du Réel

Harries, John G. 1981. «Personal computers and notated visual art». Leonardo 14(4): 299-301. https://doi.org/10.2307/1574606

Hauser, Jens. 2016. «Biomediality and art». Dans Recomposing art and science: Artists-in-labs, edited by Irène Hediger & Jill Scott. Berlin: De Gruyter https://doi.org/10.1515/9783110474596-021

Luquet-Gad, Ingrid. 2024. «Alizée Armet: De l’hybride à l’hyperlink (et aller-retour)». Lequotidiendelart.com, 22 fév. https://www.lequotidiendelart.com/articles/25227-aliz%C3%A9e-armet-de-l-hybride-%C3%A0-l-hyperlink-et-aller-retour.html

Mitchell, Robert. 2010. Bioart and the vitality of media. Seattle WA: Washington University

Nahon, Daniel B. 2008. L’épuisement de la terre: L’enjeu du XXIe siècle. Paris: Odile

Simondon, Gilbert. (1983) 2014. «Trois perspectives pour une réflexion sur l'éthique et la technique». Dans Sur la technique (1953-1983), 337-351. Paris: Presses Universitaires de France

Simondon, Gilbert. 2005. L’invention dans les techniques: Cours et conférences. Édition établie et présentée par Jean-Yves Chateau. Paris: Seuil

Springer, Anna-Sophie & Etienne Turpin. 2015. «A new image of soil». Dans Land & animal & nonanimal 2 (intercalations), 69-73. https://archiv.hkw.de/mediathek/hkw/_default/assets/000/051/505/51505_download_land-animal-nonanimal-pdf_wcewh.pdf

Stapleton, Tom. 2017. «The effects of heavy metal nickel on albino redwood chimeras» Chimeraredwoods.com. https://www.chimeraredwoods.com/projects/toxicity-experiments

Steyerl, Hito. 2009. «In defense of the poor image». E-Flux 10: 210-217. https://www.e-flux.com/journal/10/61362/in-defense-of-the-poor-image/

Taji, Acram M., William A. Dodd & Richard R. Williams. 1990. «Propagation of Australian plants by tissue culture». Australian Horticulture 889: 89–92

Thacker, Eugene. 2004. «What is Biomedia? ». Dans Biomedia, 1-33. Minneapolis MN: University of Minnesota

Thipnet, Phakhamon, Pichan Sawangwong, Chaisak Issro & Thanawee Chodjarusawad. 2016 «Portable voltammetric device for detecting heavy metal contamination». Ajer 5(11): 285-296

Tsing, Anna Lowenhaupt, Heather Anne Swanson, Elaine Gan & Nils Bubandt, eds. 2017. Arts of living on a damaged planet: Ghosts and monsters of the Anthropocene. Minneapolis MN: University of Minnesota

Yetisen, Ali K.,Joe Davis, Ahmet F. Coskun, George M. Church & Seok Hyun Yun. 2015. «Bioart» Trends in Biotechnology 33(12). https://doi.org/10.1016/j.tibtech.2015.09.011

Notes

[1] Ou PolyChloroBiphényle sont des polluants organiques persistants c'est-à-dire des substances qui se désagrègent très peu dans l'environnement et s'accumulent dans différents milieux, et en particulier le sol.
[2] En particulier dans la zone de Zirovski, les chercheurs mentionnent l’installation de plusieurs couches de pelouse. Le drainage se fait par le ruissellement de la pluie. Voir https://hdl.handle.net/20.500.14394/43527
[3] Nous renvoyons le lecteur à l’essai «Biomedia» publié par Eugene Thacker (2004) ou encore aux écrits de Jens Hausser quant à la récente exposition éponyme du ZKM, définition proposée par Peter Weibel dérive de cette même exposition (2016).
[4] L'Institut Kersnikova est une organisation à but non lucratif et une plateforme pour le développement, la production et la présentation de projets d'art d'investigation contemporains et de nouvelles œuvres d'art et la présentation de projets d'art d'investigation contemporains et de nouveaux modèles d'apprentissage non formel. Kersnikova comprend un lieu d'exposition d'exposition et trois laboratoires: La galerie Kapelica, l'espace d'art d'investigation contemporain de renommée internationale, le hackerspace Rampa, où les relations entre l'art, la technologie et la société sont reconsidérées, le laboratoire humide BioTehna, qui se concentre sur l'investigation artistique des systèmes vivants, et le laboratoire Vivarium, où l'on explore les formes possibles de coexistence entre les animaux, les champignons, les plantes et les robots. Voir: https://kersnikova.org/en
[5] L’oeuvre a pu bénéficier du soutien du réseau EMAP/EMARE et exposé dans différents expositions: Galerie kapelica, Ljubjlana, Slovénie (28 novembre 2023 au 2 février 2024); Festival da Fest, Sofia, Bulgarie (24-28 octobre 2023); Ars Electronica, Linz, Autriche ( 6-10 Septembre 2023); WRO Media Art Biennale, Wroclaw, Pologne (10-27 mai 2023)
[6] L'enracinement ex vitro des microboutures se fait à l'aide d'un milieu de culture en serre plutôt qu'in vitro, où les boutures sont enracinées sur de l'agar dans un tube à essai.
[7] «How to prepare potato dextrose agar pda using fresh potatoes». R-Open Education, YouTube video, 7:23. https://www.youtube.com/watch?v=lmhSv6-T7EQ
[9] «7 in 1 sensor with LoRaWAN RS485 Modbus». Hackster.io, published by Somsak Lima, Oct. 12, 2021. https://www.hackster.io/m2mlora/7-in-1-sensor-with-lorawan-rs485-modbus-8585a0
[10] «DIY iot water ph meter using ph sensor & ESP32» How2electronics.com, 20 août 2022. https://how2electronics.com/diy-iot-water-ph-meter-using-ph-sensor-esp32/; «DIY ph meter using ph sensor & Arduino with OLED display». How2electronics.com, 21 août 2022. https://how2electronics.com/ph-meter-using-ph-sensor-arduino-oled/; «DIY soil ph meter using soil ph sensor & arduino». How2electronics.com, 9 sept. 2023. https://how2electronics.com/diy-soil-ph-meter-using-soil-ph-sensor-arduino/; «IoT based soil nutrient monitoring with Arduino & ESP32». How2electronics.com, 9 sept. 2023. https://how2electronics.com/iot-based-soil-nutrient-monitoring-with-arduino-esp32/
[11] Notre traduction. Orig.: «Technological is not neutral»
[12] Notre traduction. Orig.: «As humans reshape the landscape, we forget what was there before».
[13] Notre traduction. Orig.: «the criticism and application of science will undoubtedly continue, perhaps a more profoundly important and yet less recognized contribution may be the ability of bioart to help science understand itself».
[14] Notre traduction. Orig.: «Bioart must be clearly distinguished from traditional art forms that exclusively use digital media to address biological themes, as in a painting or sculpture depicting a chromosome, or a digital photograph suggesting cloned children. Bioart is in vivo». «GPF bunny», Eduardo Kac (2000). https://www.ekac.org/gfpbunny.html
[15] Notre traduction. Orig.: «The point of employing authentic biotechnology is to immerse gallerists in alternative biotechnological practices. Thus, rather than seeking to protect gallerists from the effects of biotechnology, the vitalist tactic seeks to use the spectators themselves as a means - or media - for generating new biotechnological possibilities [...] the prophylactic and vitalist tactics of bioart often seem to be inscribed in a difference between 'representation' and 'presentation'».
[16] Communication personnelle du 17 mai 2023
[17] Notre traduction. Orig.: «The soil is the filtrer throught which all material production must pass».
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